Sélectionner une page
Le 14ème Congrès de l’AFSP se déroulera du 10 au 12 juillet 2017 à la Faculté de Droit et de Science politique de l’Université de Montpellier. Pour la première fois de son histoire, l’Association organisera son Congrès national dans l’une des villes les plus importantes de l’axe méditerranéen. Ce nouveau rendez-vous de la science politique française se déroulera en partenariat avec la Faculté de Droit et de Science politique de l’Université de Montpellier, le CEPEL et le CIRAD. Par son ampleur (près de 1000 congressistes sont attendus), ce Congrès permettra de mettre à l’honneur l’un des pôles les plus dynamiques de la science politique française en région. Il renforcera également la structuration future des recherches entre les différents pôles scientifiques de la discipline.
Ce Congrès sera structuré autour de trois séries d’activités distinctes :
Télécharger le programme du Congrès
Cette section thématique, organisée par Gwénaëlle Mainsant (IRISSO) et Océane Pérona (CESDIP), interroge les normes qui participent à la régulation politique de la sexualité, ainsi que les professionnels qui sont engagés dans cette régulation.
« Perçue dans sa fonction biologique de reproduction, enjeu social et économique fondamental, la sexualité a toujours été l’objet, de la part des pouvoirs d’une attention d’autant plus grande que, dans ce domaine, tout écart à la norme est considéré comme une subversion des bases mêmes de la société. […] C’est pourquoi la « police » s’est toujours vue – généralement par le biais du contrôle de la prostitution ou de la débauche – confier la surveillance des mœurs et de la sexualité » (Berlière 1994 : 267).
Ainsi Jean-Marc Berlière, historien de la IIIe République, explique-t-il à la fois, la centralité du contrôle de la sexualité dans la constitution de la puissance étatique et la pérennité de la police des mœurs. Ann-Laura Stoler (2013) ne dit pas autre chose quand elle parle de la sexualité comme matrice du projet colonial. Là où l’historien parle de police des mœurs, cette section thématique interroge à nouveaux frais la place et l’actualité du gouvernement de la sexualité dans l’appareil d’Etat. Dit autrement, il s’agit ici de rassembler des communications portant sur les politiques sexuelles contemporaines, qu’elles touchent explicitement à la sexualité (à la procréation, aux violences sexuelles, à la prostitution, à la prévention du VIH/SIDA) ou que la sexualité constitue un enjeu sous-jacent de politiques plus larges (notamment sur la gestion de la PMA/GPA ; des violences sexuelles lors d’interventions armées en Afrique ; de l’éducation sexuelle dans les politiques scolaires avec la récente controverse autour des ABCD de l’égalité ou de la prévention de la dangerosité dans les politiques pénales). Important en science politique des questionnements foucaldiens, cette section thématique vise à faire dialoguer les études sur la sexualité et la sociologie de l’action publique.
Les recherches sur les liens entre sexualité et politique constituent depuis quelques années un domaine dynamique en science politique comme en témoigne le foisonnement récent de numéros thématiques sur les « politiques sexuelles » (Levêque et Matonti, 2014), les « nationalismes sexuels » (Jaunait, Renard, Marteu, 2013), « l’internationalisation des causes sexuelles » (Broqua, Fillieule, Escoda i Roca, 2016) ou encore sur les rapports entre « sexualité et politique en francophonie » (Paternotte et Perreau 2012). De nombreux travaux ont documenté les mobilisations autour des causes sexuelles – leur histoire et les modes d’engagement (Delage, 2016 ; Verdrager 2013 ; Pavard 2012) –, la construction de problèmes publics autour de la sexualité ainsi que leur mise sur agenda (Boussaguet, 2009 ; Engeli, 2009 ; Mathieu, 2014), les débats publics autour de la sexualité (Chetcuti, 2014 ; Fassin 2003), ou encore l’évolution des lois autour de la sexualité (Mossuz-Lavau 2002). En revanche, peu de recherches se sont intéressées au gouvernement de la sexualité comme « politique publique » mais aussi comme « conduite des conduites ». C’est à ce champ d’étude que se consacre cette section thématique.
Cette section thématique s’inscrit donc dans la lignée de la thèse, désormais célèbre, de Michel Foucault (1976) : dans nos sociétés, le pouvoir n’opère pas par la répression des pulsions sexuelles, mais par la production de multiples sexualités qui, par leur classification, leur distribution et leur hiérarchisation morale, sont soit approuvées comme conduites normales, soit au contraire marginalisées, disciplinées et normalisées. La sexualité n’est pas vue tant sous l’angle de sa construction sociale qu’au niveau des mécanismes locaux de contrainte – perspective ici retenue dans les communications. Cette perspective a durablement marqué le champ des études sur la sexualité en sciences sociales et politiques. Pourtant, quand bien même Foucault estimait nécessaire de s’intéresser aux pratiques (notamment de contrôle), il demeure dans ses écrits une ambiguïté plus générale, relative au statut des acteurs au sein des dispositifs de pouvoir (policiers, gardiens de prison, maître d’école, prêtres, etc.). Cette ambiguïté pourrait fournir une piste d’interprétation de la présence marginale de l’échelon du contrôleur dans le champ des recherches sur la sexualité très marqué par le prisme foucaldien (Mainsant, 2012). A titre d’exemple, les études des politiques de la prostitution accordent la part belle à l’analyse des lois et des politiques (la problématisation/les cadres cognitifs), d’un côté, et à l’expérience du contrôle par les contrôlés (les effets des politiques), de l’autre mais laissent dans l’ombre le travail des policiers chargés de mettre en oeuvre ces politiques (à l’exception de Jaksic 2011, Mainsant 2008, Proscrim). Plus encore, même lorsque les travaux sur les violences sexuelles portent sur le contrôle exercé par les institutions pénales, ils privilégient une approche quantitative des dossiers judiciaires au détriment d’une étude des modes de production de ces dossiers par les policiers et magistrats (Pérona, 2016). De ce fait, les logiques organisationnelles (administrative, gestionnaire, bureaucratique) comme professionnelles restent encore peu prises en compte dans l’analyse des politiques sexuelles. Là où des changements des politiques sexuelles ont souvent été interprétés comme des « entreprises de morale » (Becker 1985), l’attention prêtée aux pratiques des agents de l’Etat, à la prégnance de routines professionnelles, aux effets d’hystérésis au sein des organisations, permettrait de livrer de nouvelles pistes d’explication des changements d’action publique ou des entraves à ces changements – pour expliquer par exemple la pérennité du contrôle policier de l’homosexualité après sa dépénalisation.
La sexualité en raison des enjeux moraux qu’elle charrie, des formes de stigmate qu’elle véhicule, des émotions qu’elle suscite, des espaces (privé/public) dans lesquels elle se déploie, constitue un enjeu saillant pour la sociologie de l’action publique, aussi bien sous l’angle des normes et des formes de régulation, que des professionnels engagés. L’étude de la diversité des normes de régulation de la sexualité constitue le premier axe de cette section thématique. Quelles sont les normes qui participent à la régulation politique de la sexualité ? Par quelles instances sont-elles produites ? Par quelles médiations opèrent-elles ? A titre d’exemple, si le droit constitue un important vecteur de normes sexuelles, les pratiques des institutions répressives produisent également des normes sexuelles relevant du contrôle social. Mais les normes peuvent aussi prendre la forme d’une morale sexuelle publique, existant indépendamment du droit en vigueur et en dehors des institutions pénales, se développant au travers des pratiques des institutions médicales, sociales ou éducatives – comme en témoigne la stigmatisation d’une pratique légale comme l’avortement. Ainsi, cette section thématique reprend ainsi un questionnement ancien sur le statut du droit dans le contrôle social – chez Malinowski (1933) comme chez Levi-Strauss (1958) – visant à éprouver à nouveaux frais l’hypothèse selon laquelle la sexualité est un domaine autant régulé par le droit que par des normes sociales et morales (Benabou 1987 ; Bernstein 2007 ; Scoular 2010).
Le second axe de cette section thématique est centré sur les professionnels engagés dans la régulation de la sexualité. Comment opèrent-ils un travail de classification, de tri entre la norme et la déviance (Darley, Mainsant 2014) en matière de sexualité? De quelle manière le gouvernement de la sexualité engage les agents de l’Etat dans des processus de coopération ou de concurrence avec d’autres professionnels (on pense par exemple aux personnels de l’Education Nationale appelés à collaborer avec la justice dans la lutte contre les violences sexuelles sur mineurs) ? Comment ce contrôle participe-t-il à la redéfinition des fonctions des professions et à déplacer les frontières entre contrôle pénal, médical et social ? Enfin, quelles sont les opérations de qualification par desquelles les professionnels identifient des sexualités dites normales ou déviantes ?
Télécharger le programme des 76 Sections thématiques
Tous les participants au Congrès 2017 doivent obligatoirement être inscrits et renvoyer un formulaire d’inscription (quelque soit leur mode ou montant de paiement), qu’ils soient intervenants, responsables, présidents de séances, discutants ou visiteurs. Vous pourrez au moment de votre inscription sélectionner les Sections Thématiques auxquelles vous souhaitez participer.