Analyse d’un échantillon de jugements rendus en matière d’infraction à personnes dépositaires de l’autorité publique dans un TGI parisien (1965-2003)
par , – mars 2006
Les infractions à l’encontre des policiers (outrage, rébellion et violences) sont un des indicateurs fréquemment retenus de la tension existante entre policiers d’un côté et « jeunes bien connus des services » de l’autre. La présente étude analyse trois échantillons de prévenus de telles infractions devant un TGI de la grande périphérie parisienne de 1965 à 2003 : 1 399 prévenus jugés en correctionnelle, 225 jugés au tribunal pour enfants, 149 jugés en cabinets de juges pour enfants. L’analyse, qui témoigne d’une augmentation massive de ces affaires à partir du milieu des années 1990 et plus encore du début des années 2000, permet d’établir un certain nombre de corrélations avec d’autres phénomènes voisins.
L’analyse se penche également sur la nature des prévenus, en effectuant des regroupements par lieux de naissance et patronymes. Elle rend compte d’une surreprésentation des prévenus apparentés au groupe « Maghrébins », surreprésentation accentuée parmi les prévenus condamnés à des peines d’emprisonnement ferme, parmi les prévenus condamnés à des peines supérieures à deux mois d’emprisonnement ferme, et parmi les prévenus auxquels les policiers, en qualité de partie civile, demandent un dédommagement pour préjudice moral. Cette discrimination est analysée selon ses composantes propres, et fait ressortir tout un ensemble de singularités des membres du groupe « Maghrébins », qui toutes tendent à suggérer leur plus grande représentation au sein d’une « clientèle captive » des services judiciaires. De ce fait, l’étude affine et relance la question des instances effectivement productrices de discrimination ; ainsi que des questions relatives à l’autonomie des phénomènes policiers par rapport aux phénomènes sociaux plus généraux.